Main dans la main - Action de sensibilisation aux Restos du coeur20 avril 2016 |
La sensibilisation est un enjeu majeur pour La Cimade
aujourd’hui. Mais au-delà du grand public, des cibles plus
spécifiques peuvent être particulièrement
intéressantes à toucher, comme par exemple les membres
d’autres associations. Ainsi à Toulouse, une action a
été menée en direction de bénévoles
des Restos du cœur.
C’est Philippe Meynadier, responsable des « activités
rue » des restos du cœur 31, qui a eu l’idée d’un partenariat avec La
Cimade : « Au sein de la
population que nous accompagnons, il y a, entre autre, des personnes migrantes.
Elles sont amenées à nous poser des questions sur leur situation, mais nos
équipes bénévoles ne sont pas des professionnels de l’action sociale et encore
moins du droit des étrangers. Pourtant, aux Restos, nous essayons aujourd’hui
d’aller au-delà de la simple distribution de nourriture et de développer ce que
nous appelons l’aide à la personne, c’est-à-dire l’accès aux droits des
personnes que nous rencontrons. »
« Nous avons
constaté une énorme méconnaissance de la part de nos équipes sur la situation
des étrangers en France, et beaucoup de préjugés aussi. Au-delà de l’aspect
purement formatif, cette initiative avait aussi pour but de leur donner un
autre regard sur la situation des personnes étrangères qu’ils sont amenés à
accompagner. »
« Il y a beaucoup
de sujets sur lesquels les bénévoles débarquaient complètement. Leurs préjugés
n’étaient pas forcément négatifs, mais ils ne se rendaient pas compte à quel
point on fait tout pour rendre la vie difficile aux migrants. » se
souvient Philippe Meynadier. « Nos
bénévoles sont pour la plupart des
personnes assez âgées, retraitées, et qui ont une image positive de l’Etat, de
la loi… Du coup, ils ont pris la
réalité en plein visage. Ils ont découvert par exemple toutes les situations
dans lesquelles les personnes sont soumises à l’arbitraire de la
préfecture : dans leur tête il ne pouvait pas y avoir d’arbitraire,
puisque c’est la loi ! Il y a eu une vraie prise de conscience. »
![]() « Le parcours des
demandeurs d’asile est très long, on a tendance à l’oublier » glisse
ainsi Pierre Grenier pendant sa formation, entre la présentation des différents
visas Schengen et la lecture d’un extrait de la convention de Genève. « La plupart viennent à pieds. Quand je dis
cela, ce n’est pas une image. Ce n’est pas en voiture, pas en vélo, pas en
cheval, ils viennent à pieds, littéralement. Ça peut leur prendre des mois, ou
des années. » Dans la salle, l’audience accuse le coup. A la fin de la
session, les questions fusent, parfois techniques, parfois plus politiques, ce
qui donne à Pierre l’occasion de relativiser par les chiffres la
« crise » des réfugiés, ou encore de faire le point sur l’accueil des
« relocalisés » en France depuis septembre. Les bénévoles des Restos
en ressortent avec à la fois une idée plus précise du fonctionnement global de
l’asile, nombre d’informations pratiques sur la situation à Toulouse, et un
aperçu de la philosophie de La Cimade : « Notre règle d’or, c’est de renseigner les gens sans les juger et sans
leur dire ce qu'ils doivent faire ! »
![]() Pierre Grenier « L’objectif
final, c’est que la première approche des bénévoles avec les personnes
accompagnées soit la meilleure possible » conclue Philippe Meynadier.
« En fonction du poste du bénévole,
ça peut aller d’aiguiller les personnes en évitant les plus grosses bêtises
(envoyer quelqu’un à la préfecture alors qu’il risque une OQTF, par exemple),
au fait de leur donner des informations sur leurs droits – sans chercher à
devenir des experts juridiques. Il reste encore du travail pour que les
connaissances de nos équipes soient plus solides, mais c’est un début de
partenariat encourageant ! »
Nul doute que la déconstruction de préjugés opérée pendant ces formations participera à renforcer la pertinence et la bienveillance des bénévoles des Restos du cœur dans leurs rencontres avec notre public. Une manière innovante de contribuer à l’amélioration de l’accueil réservé aux personnes étrangères, même lorsqu’elles sont reçues et accompagnées ailleurs qu’à La Cimade.
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