Dans nos régions - Mobilisation en Rhône-Alpes contre les baisses de subventions régionales25 octobre 2016 | Les changements de
majorité politique à l’échelle locale,
régionale ou nationale peuvent avoir des conséquences
considérables sur la politique de soutien aux associations. En
Rhône-Alpes, l’arrivée de Laurent Wauquiez à
la tête du conseil régional a marqué une chute des
subventions qui mettent en grand danger le tissu associatif local.
Point sur la situation et les mobilisations en cours.
Décembre 2015, résultat des élections régionales dans la
nouvelle région Auvergne - Rhône Alpes : c’est Laurent Wauquiez, élu des
Républicains, qui remplace le socialiste Jean-Jack Queyranne à la tête de la
région. « Au début de son mandat en janvier, la nouvelle
majorité prenait ses marques, il n’y a pas eu beaucoup de communication sur la
politique associative envisagée » se souvient Kaoutar Djemai-Dawood,
déléguée nationale de La Cimade en région Rhône-Alpes. « Mais quelques
temps plus tard, les référents techniques qui nous accompagnent sur les
questions de subvention ont commencé à nous dire : « Vous n’allez
pas passer en commission prochainement, nous n’avons pas les dates des
commissions à venir pour les subventions 2016 ». Nous avons commencé à
nous inquiéter car nous craignions une baisse des montants mais n’avions aucune
visibilité pour travailler sur notre budget 2016 ». Du côté des autres associations de la région, mêmes
réponses, mêmes inquiétudes. Et puis petit à petit, les montants des
subventions ont commencé à tomber, faisant l’effet d’une bombe pour les
associations concernées : les montants étaient bien souvent diminués de
moitié, quand les subventions n’étaient pas purement et simplement supprimées. « Laurent
Wauquiez a procédé de façon progressive » analyse Kaoutar
Djemai-Dawood. « Au début, c’était le flou artistique, il n’y avait pas
de direction politique claire, tout le monde n’était pas impacté en même temps
ni de la même manière. Des mini-scandales ont éclaté ponctuellement dans la
presse, notamment lorsque le festival Jazz à Vienne, organisé par un proche de
Laurent Wauquiez, a vu sa subvention multipliée par deux, alors même que de
petites associations culturelles voyaient les leurs réduites à néant. Mais cela
restait disparate. » De fait, chaque association touchée a essayé de réagir,
réclamant des rendez-vous ou contactant la presse. Peu à peu les lettres
ouvertes à Laurent Wauquiez se sont multipliées. Mais ce n’est qu’au bout
de quelques mois que le milieu associatif a pris conscience collectivement de l’ampleur
du phénomène. « En juin, l’orientation politique a commencé à
devenir plus claire : la priorité du conseil régional était de soutenir
les partenaires associatifs et institutionnels qui œuvrent pour la création
d’emploi, et de faire des économies sur le reste, en particulier les
associations considérées comme faisant de « l’assistanat ». Dans les
faits, nous nous sommes rendu compte que c’était l’ensemble du tissu associatif
qui était touché : culture, sport, économie sociale et solidaire, environnement,
syndicats… aucun secteur n’est épargné. Les seules associations qui s’en
sortent bien sont celles dirigées par des amis ou proches politiques. » Le Mouvement associatif (ex CPCA), une fédération
d’associations, a lancé une enquête auprès des associations ayant leur siège
social en Auvergne et Rhône-Alpes. Suite à cette enquête, il évalue à 300 le
nombre de pertes d’emplois que cette politique pourrait occasionner. Les
petites associations, en particulier, sont celles qui risquent le plus de
souffrir voire de disparaître complètement : par exemple les associations
proposant des chantiers de réinsertion sociale, qui sont plus de 500 sur le
territoire. Et La Cimade là-dedans ? « La Cimade attend
toujours une réponse pour sa demande de subvention déposée en décembre dernier »
soupire Kaoutar Djemaï Dawood. « Nous
avons rencontré en juin la
vice-présidente en charge des affaires sociales, qui nous a dit
que nous
devrions montrer la pertinence et la nécessité des
programmes menés par rapport
au reste de l’offre associative. Pour l’heure, notre
dossier n’a été présenté à
aucune commission paritaire. Les années
précédentes, nous avons été
subventionnés à hauteur de 20 000 à 30 000 euros,
donc c’est un de nos
bailleurs les plus importants... Mais au vu des positions politiques de
Laurent
Wauquiez sur l’accueil des migrants, nous ne nous faisons pas
d’illusions. » Face à ce constat, et après que chaque association se soit
battue de son côté pendant des mois, une mobilisation collective est en train
de voir le jour. « Tout le monde fait le constat que la présidence
régionale précédente avait réussi à construire des choses que Laurent Wauquiez
est en train de détricoter » constate Kaoutar Djemai-Dawood. « C’est
une vision partagée y compris par des associations non politisées, voire de
droite. Il est tout simplement en train de détruire le réseau associatif. » Le Mouvement associatif, très
sensibilisé, est en train d’envisager des actions pour alerter les services
décentralisés de l’Etat sur l’impact de la politique de l’emploi dans la
région. Il travaille également sur un petit film démontrant l’importance du
monde associatif dans l’économie, la vie culturelle, la vitalité d’un
territoire. En parallèle, les Associations Unies Rhône-Alpes
(déclinaison régionale du Collectif des associations unies travaillant sur les
questions de mal-logement) est en train de construire sa mobilisation. Composé
des branches régionales d’associations nationales de logement et d’insertion
(Ligue des Droits de l’Homme, Secours Catholique, Médecins du Monde, FNARS,
Fondation Abbé Pierre…), ce réseau se prépare à mener une bataille d’envergure.
Un projet d’action est actuellement en réflexion – à suivre dans les mois à
venir ! … « Au final, Laurent Wauquiez aura réussi à fédérer
toutes les associations contre lui » constate Kaoutar Djemai-Dawood. « Il
pousse toutes les associations présentes sur le territoire Auvergne Rhône-Alpes
à démontrer leur volonté de ne pas disparaître, et se battre jusqu’au
bout ! » Si l’exemple de la région Auvergne Rhône-Alpes est
criant, il est loin d’être isolé : d’autres régions font également les
frais d’un changement de majorité régionale, notamment l’Ile de France. Et il
est vraisemblable que la situation ne s’améliore pas dans les temps à venir,
que ce soit au niveau local, régional ou national. Aussi la mobilisation sur la
question des financements est-elle indispensable à tous les niveaux pour
permettre à La Cimade de poursuivre ses actions. |