Portrait de Cimadien - Jean-Charles Kaiser, à Strasbourg22 décembre 2016 | Portrait réalisé par Marion Rouillard ![]()
Durant des années, j’ai formé des
bénévoles et des professionnels à la conduite
d’entretien et à l’écoute, surtout dans le
domaine de la santé (hospitalière). J’ai d'abord
été pasteur de paroisse, puis aumônier en
hôpital. Alors que j’étais en poste aux
Hôpitaux Universitaires de Strasbourg, j’ai suivi en
parallèle en Allemagne une formation à
l’écoute et à l’accompagnement,
jusqu’à devenir moi-même formateur.
J’ai toujours entendu parler de La Cimade, avec d’autant plus d’intérêt que mes grands-parents maternels ont été évacués en 1939 vers la Dordogne, là où l’association est née : on m’en a toujours parlé, depuis mon enfance. Et puis à mon tour, durant mes études ou dans les paroisses que j’ai accompagnées, j’ai toujours eu des contacts avec elle, autour de l’accompagnement de personnes migrantes qui vivaient là : dans un foyer SONACOTRA, des « Boat-people »… De même, lors de la chute du « Rideau de fer », beaucoup de personnes migrantes arrivaient des pays de l’Est avec des problèmes de santé, et nous les retrouvions à l’hôpital. À ma retraite, j’ai pensé utile de mettre mes compétences à disposition de ma région Cimade : l’Alsace - Lorraine, pour des formations à l'entretien et des groupes d’analyse de pratique. C’est là qu’on m’a proposé de rejoindre un groupe d’appui créé par La Cimade au niveau national. Aujourd’hui, après avoir établi il y a 3 ou 4 ans une « charte » qui marque nos points d’accord sur la déontologie à laquelle nous nous tenons, les 5 membres de l’équipe d’appui nationale de La Cimade interviennent à la demande. Les groupes locaux font appel à nous via leur délégué.e en région, leur bureau régional ou les responsables du Pôle "Vie Associative". Généralement, ils nous demandent une formation à l’entretien, parfois une médiation en cas de conflit interne. Nous tâchons d’être deux pour assurer une journée de formation. Ainsi nous avons été à Paris, Nantes, Lille, Lyon, Valenciennes, Bordeaux, Rennes.... Nous insistons sur l’aspect relationnel, la formation sur les aspects juridiques des entretiens étant assurée par d’autres personnes spécialisées dans ce domaine. En 2016, nous avons également pu proposer des sessions thématiques nationales sur « prévenir les conflits en équipe » et « le traumatisme de l’exil », à Paris. Nous espérons que les participants retournent dans leur région avec l’idée de nous interpeller et nous inviter. Enfin, chacun(e) des membres de notre équipe est aussi animateur ou animatrice de groupes d’« analyse de pratique » ou de « groupes de parole » au sein de son propre groupe local. À Strasbourg, nous avons instauré un temps dédié toutes les 6 semaines environ, pendant lequel chaque membre d’un groupe peut évoquer une expérience particulière pour essayer de comprendre mieux, avec le groupe, pourquoi l’entretien évoqué s’est mieux ou moins bien passé, ce qui a pu échapper… Nous essayons ainsi de progresser ensemble pour être plus disponibles et « plus à l’écoute » lors des entretiens que nous sommes amenés à faire par la suite. Je trouve important que La Cimade considère les personnes exilées dans leur globalité, même si le juridique est son cœur de métier. Les personnes rencontrées ont un vécu difficile, il est essentiel de le prendre en compte au moment des rencontres et des entretiens. Par ailleurs, j'estime vital que les bénévoles qui s’engagent dans ce domaine puissent eux-mêmes être pris au sérieux dans les difficultés auxquelles ils sont exposés, en particulier dans le contexte sociétal actuel. Le soutien que nous proposons permet de ne pas se sentir abandonné en situation difficile : les entretiens d’accueil de La Cimade ne sont pas toujours des moments simples à vivre ! Cette forme d’engagement est pour moi une manière de militer pour que l’humain soit mis au premier plan. Mon activité à La Cimade m’apporte également la rencontre de personnes engagées et motivées, qui me donnent de beaux exemples de militance. Ils s’enracinent pour moi dans un mot important pour les protestants : résister ! Résister aux peurs, résister aux endoctrinements, résister aux phénomènes de masse... bref, résister à l'inhumanité. C’est un lieu de vie et d’espérance ! |