#30 - juillet 2019
La Cimadine
Main dans la main

La formation nouvelle loi

La loi n° 2018-778 du 10 septembre 2018, « pour une immigration maîtrisée, un droit d’asile effectif et une intégration réussie » qui réforme le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (Ceseda), a fortement impacté les droits des personnes accompagnées et la façon dont La Cimade les accompagne. Pour anticiper ces changements, une formation a été pensée et construite autour de deux objectifs :

•    Sensibiliser le mouvement : comprendre les mécanismes, les enjeux de cette loi et l’analyse politique que l’on peut en faire ;

•    A destination des bénévoles Cimade dans les permanences : savoir répondre aux sollicitations des personnes étrangères.

Contrairement à 2016, où la formation avait été construite au national puis proposée aux régions, celle-ci a été co-construite : entre les pôles nationaux et certain·e·s salarié·e·s et bénévoles en région.
Cette co-construction, bien qu’ambitieuse, a initié une véritable dynamique. La réflexion entre salariées en région et responsables thématiques a apporté une vision nouvelle permettant de renouveler les schémas classiques de formation : temps magistral suivi de cas pratiques. Cela a abouti à la proposition d’une variété d’exercices, pour beaucoup issus de l’éducation populaire, modulable pour chaque région.

Concrètement, la formation s’appuie sur une base commune : un support classique qui déroule les grandes évolutions de la loi et retrace les évolutions historiques des droits des personnes étrangères en France. Sont ensuite proposés des exercices sur les différents thèmes traités par La Cimade avec des formats d’animation spécifiques.

Interview d’Alice Dupouy et Catherine Cagan, Chargées de projet régional de la région Sud-Ouest

Qu’est-ce qui vous a donné envie de participer à ce groupe de travail ?


« Une partie importante de notre travail est la formation continue des bénévoles de la région. Quand une nouvelle loi est en préparation, de nombreuses interrogations apparaissent, comment s’adapter pour accompagner au mieux les personnes étrangères ?

Depuis un certain temps, nous avions en tête de proposer des formations en réunissant géographiquement plusieurs groupes locaux pour favoriser les échanges.
Partie d’une envie d’échanger avec les collègues pour trouver de nouvelles formes d’animation adaptées à nos attentes, il y a eu un véritable engouement suivi d’un élan commun.
Les pôles ont proposé de nous rassembler à l’occasion d’une journée de travail au siège de la Cimade pour mettre en place un module commun ».

Comment a été construite cette formation ?

Nous étions une vingtaine de personnes environ : responsables thématiques, salarié·e·s et bénévoles en région. L’unique réunion physique a permis une réflexion commune autour de nos attentes et celles de l’ensemble du mouvement au sujet de cette énième loi.
Lors de cette journée nous ne sommes pas entré.e.s dans le détail de chaque nouvelle disposition dont les participant.e.s avaient pris connaissance en amont.
Nous nous sommes plutôt attaché·e·s à la forme que devrait prendre ce module et à rassembler les disposition par axes thématiques. Là encore, nouvelle formule : les thématiques choisies divergent en partie de celles généralement identifiées (séjour, asile, éloignement, etc), on s’oriente vers les suivantes : précarisation, contrôle, expulsion, suspicion.

Des sous-groupes se sont constitués ensuite pour travailler sur les axes thématiques identifiés.
Le travail en sous-groupe a été compliqué du fait notamment de la diversité des niveaux de connaissance du sujet et des disponibilités de chacun·e. Mais des modules thématiques en sont sortis à chaque fois.  

Cimade formation Sud Ouest

Côté Sud-Ouest nous nous étions un peu précipité·e·s et avions programmé des formations dans toute la région dès le mois de février. L’appropriation des modules s’est donc faite en partie en urgence. Nous prévoirons un autre timing une prochaine fois.

Nous avons ainsi dispensé cette formation 4 fois (Bordeaux, Toulouse, Cahors, Pau) pour les 14 groupes locaux de la région . Lors de la première formation, Clémence Richard est venue à Bordeaux. La co-construction est donc allée au-delà de la création du module en lui-même.
Il y avait entre 35 et 47 personnes par session de formation
Nous avons donc fait évoluer les modules en fonction du nombre de personnes et des retours que nous avons récolté à la fin de chaque session
Sur le fond, la formation proposée est basée sur une réflexion menée en commun, elle n’est ni descendante, ni magistrale.
De plus en plus de salarié·e·s sont formé·e·s aux techniques d’animation de l’éducation populaire. Ça n’est d’ailleurs pas toujours bien reçu, il faut prendre un temps pour présenter ce que cela signifie, ce que cela implique aussi.

Il y avait une pression supplémentaire, car la nouvelle loi, pour ne pas faciliter les choses, entrait en vigueur en 3 étapes : septembre 2018, janvier et mars 2019.

Une autre intention était de rendre cette formation modulable par les bénévoles eux-mêmes.

En Île-de-France, quelques bénévoles ont pris part à la formation dès la préparation. Dans le Sud-Ouest, il y a certains sujets assez précis sur lesquels cela se fait déjà un peu. Mais aujourd’hui, sur cette formation spécifiquement, cela nous semblait compliqué à plusieurs égards. On le mettra en place dans les années à venir.
Ces dernières années, l’accent n’a pas été mis sur cette priorité, d’abord parce que logistiquement c’est complexe, il faut pouvoir se déplacer partout, puis former des personnes à la formation prend énormément de temps.

Comment la formation été reçue ?

Globalement, ça a été plutôt positif, notamment sur la participation et les techniques d’animation. Beaucoup s'attendaient à ce que soient énumérés les changements qu’impliquent les dispositions. Ça en a destabilisé·e·s certain·e·s au début mais l’exercice a conquis au final.

Il y a de véritables enjeux aujourd’hui et dans les mois à venir : beaucoup de nouveautés à observer, on ne sait pas comment les préfectures vont s’en emparer. Il faudra certainement adapter nos pratiques quotidiennes et en fonction des évolutions, penser aux stratégies à adopter.

D’un autre côté, il y a des choses sur lesquelles on a a de plus en plus de mal à agir, des personnes se retrouvent dans des situations inextricables. Il faut penser à d’autres modes d’accompagnement.
Il y a une envie de maîtriser les volets techniques pour accompagner les personnes mais aussi ne pas uniquement chercher à s’adapter aux nouvelles lois.

On se retrouve sur des actions de communication, de mobilisation et de désobéissance civile et nous sommes en même temps très experts. Le positionnement de La Cimade est à redéfinir. Il faut trouver un espace permettant une réflexion un peu globale sur toutes ces thématiques.

Merci à Alice, Catherine et Lise !

En savoir plus sur :

Alice Dupouy
Bénévole à Calais durant l’été 2009, Alice a effectué plusieurs stages dans des associations pour les droits des étrangers à Paris comme le GISTI et La Cimade Ile-de-France sur l’expulsion et l’éloignement. Elle rejoint le CRA Mesnil-Amelot, en devient responsable régionale, puis Chargée de projet régional des permanences Séjour en IDF avant de rejoindre fin 2017 l’équipe Sud-Ouest.

Catherine Cagan
Bénévole au sein d’associations diverses en matière de droit des étrangers, comme à la LDH ou au GISTI, Catherine est arrivée en 2006 en tant que stagiaire pour le groupe local de Toulouse. Devenue bénévole avant d’intégrer l’équipe rétention de Toulouse, puis du Mesnil-Amelot, elle est en poste depuis 2009 pour la région Sud-Ouest.

Crédit photo : Photo Cimade

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