#34 - avril 2023
La Cimadine
Les Actions de plaidoyer en région

En juin 2022, Gérald Darmanin annonçait un nouveau projet de loi sur l’immigration. Dès la rentrée scolaire, suite à la dynamique lancée au niveau national par La Cimade, deux bénévoles de l’équipe prison en Normandie ont souhaité se mobiliser pour interpeller les parlementaires sur leur territoire. Ce faisant, elles ont amorcé cette dynamique dans la région. Très vite, une première réunion régionale a été organisée avec Sophie Dru, adjointe des pôles thématiques nationaux et les bénévoles intéressé.e.s pour partager des outils et se donner des objectifs. Depuis, chaque rencontre fait l’objet d’une préparation avec Sophie, Bénédicte, la DNR, et les bénévoles qui organisent le RDV pour partager les dernières actualités locales et législatives.
Pour mieux comprendre cette dynamique de plaidoyer auprès des parlementaires déployée également dans toutes les régions, nous vous proposons de découvrir le témoignage de trois bénévoles au travers d’un entretien croisé : direction la Normandie où nous avons rencontré Stéphane, Laurence et Samuel, qui mènent des actions de plaidoyer depuis plusieurs mois ! normandie

Comment et quand vous êtes-vous intéressé·e aux actions de plaidoyer ?

Laurence Capelle Laurence Capelle :  Hélène et moi avons décidé dès septembre 2022 de réfléchir à des actions et au vu des premières discussions sur le projet de loi, de contacter nos élus pour leur faire connaître notre point de vue vis à vis de ce projet, notamment sur ce qui se passe en prison et aussi concernant la rétention.


Stéphane Piney :  Cela fait 20 ans que je suis à La Cimade. J’ai commencé les actions de plaidoyer à destination de parlementaires à chaque nouveau projet de loi, et il y en a eu !  On a très vite commencé à rencontrer des sénateurs et députés avec Sophie Dru, du siège. 


Samuel Lesart : Le plaidoyer en direction des politiques a débuté pour moi lors des dernières campagnes municipales, les EGM (Etats Généraux des Migrations) étaient alors très actifs. On avait fait des courriers et rencontré plusieurs pour les candidats et j'avais rencontré à la Mairie de Caen. La dynamique a été créée à ce moment-là avec les EGM, on avait mis en place des groupes de travail et il y avait un suivi régulier. Les EGM sont moins actifs désormais et c'est difficile de garder le lien sur le long terme, notamment en tant que bénévole.


Sur l’angle des parlementaires, un député nous avait transféré un courrier du préfet qui disait - en résumé - que la dématérialisation c’était super. Le parlementaire nous l’a transféré pour demander l’avis de La Cimade, c’était très intéressant. Nous avons gardé de bons contacts. Cependant, on voit que c’est nettement plus facile d’obtenir des rendez-vous avec eux quand il y a un projet de loi. Nous avons eu beaucoup plus de retours ces derniers temps, quand le projet de loi était imminent dans l’agenda, notamment mi-mars. 



Aviez-vous déjà fait du plaidoyer avant la Cimade ?


bull

Stéphane : J’ai commencé avec La Cimade directement !


Laurence : Oui, quand je militais avec la FCPE.


Samuel : Je n’avais jamais fait ça avant, mais les sujets politiques et plus précisément les politiques publiques m’ont toujours intéressées.



Comment se sont passés les rendez-vous avec les parlementaires ?


Stéphane : J'ai toujours été très bien reçu par les parlementaires. Le contact se fait positivement. Il y a une vraie écoute. Ce qui manque souvent, c'est le suivi derrière. C'est difficile de mesurer l'impact de nos entretiens. Mais en même temps, cela permet de toujours garder un lien, montrer qu'on est là. Cela fait du bien que notre discours - différent de ce qu’on entend actuellement - soit entendu. 


Laurence : Nous avons rencontré, en octobre, un député PS avec qui nous avons eu une bonne discussion à bâtons rompus qui a duré environ 2h. Son chef de cabinetcollaborateur parlementaire et lui nous ont posé beaucoup de questions et notamment sur nos relations avec la préfecture. Il semblerait que le député lui aussi ait du mal à communiquer avec les services. Nous avons fait un bref état des lieux de nos observations en prison : conditions indignes, surpopulation, promiscuité, inactivité forcée et violences de toutes parts. Nous leur avons parlé de la notion de menace du trouble à pour l'ordre public qui n'était pas explicitéest flou et qui du coup étaitest surexploitée par les préfectures. D'autre part, nous avons évoqué le délai de recours de 48h pour les contre une OQTF en prison qui est seulement de 48h a été jugé trop faible ; cette info les a sidérés. Ils ont souhaité que l’on organise une visite des prisons du Havre et de Rouen. En ce qui concerne le CRA, ils connaissaient bien sûr la structure, mais tous les deux ont beaucoup appris sur le fonctionnement. D'ailleurs une visite a suivi fin octobre avec deux autres députés. Nous avons également eu un RDV avec une députée Renaissance fin octobre. L’accueil était cordial, mais plus froid. Cependant Nnous avons pu aborder la dématérialisation, les conditions en prison, la rétention, le nombre surélevé de condamnations. Bien que consciente de certaines difficultés, elle n’avait pas de propositions à apporter.

 

Samuel : Nous avons eu des réponses positives à nos demandes de RDV en mMars, contrairement à nos demandes de dDécembre restées sans réponse. Le projet de loi étant l’actualité du moment, ils étaient plus enclins à nous rencontrer, même la majorité ! On vise large pour les rencontres, sauf si vraiment ils ou elles sont hostiles. On a des échanges plutôt réguliers avec une personne du PS, et trois personnes de la majorité. Globalement, la Cimade est prise au sérieux, nous nous sentons légitimes et écouté.es.


Ces rencontres ont trois objectifs à mon sens. Le premier, en ce moment, c’est sensibiliser les élu·e·s sur le projet de loi, dans l'idéal qu’ils soient contre ou bien qu’ils s’abstiennent, et également qu’ils déposent des amendements. On souhaite qu’ils portent notre parole. Bien sûr quand on rencontre des élu·e·s de la majorité, ce n’est pas toujours simple ! Ensuite bien sûr, c’est sensibiliser plus globalement sur le sujet de l’immigration, qu’ils puissent changer de regard, en faveur de l'accueil.  Le troisième objectif est d’apporter de l'information à Sophie, au national, qu’elle puisse faire un suivi. 



Quels conseils auriez-vous à partager ?


Stéphane : On se base beaucoup sur le terrain, nos expériences, les pratiques des préfectures locales, mais il ne faut pas perdre de vue l’objectif premier : les changements de loi. Les exemples locaux illustrent nos propos, mais il ne faut pas « tomber » dedans et perdre le fil de la discussion avec les politiques qui ont tendance à poser beaucoup de questions sur les préfectures et sous-préfectures, par exemple.


Laurence : C’est bien de s’organiser au niveau régional pour avoir une complémentarité dans l’équipe et avoir des relais. Nous pouvons aussi porter des problématiques différentes selon les villes. 


Samuel : Il faudrait toujours plus de liens entre le terrain et nos actions de plaidoyer. De mon côté, je suis investi sur le plaidoyer mais pas dans les actions deen permanences ou d’ateliers socio-linguistiquesen ASL, et parfois je manque de nouveaux éléments, de nouvelles observations. Je pense aussi que l’inter associatif est essentiel, on se sent plus forts, avec plus d’impact.



Propos recueillis par Louise Lacombled.



Plusieurs groupes locaux partout en France sont mobilisés auprès de leurs parlementaires pour dénoncer les mesures les plus contestables du projet de loi, les sensibiliser sur les difficultés locales rencontrées par les personnes étrangères et leur faire connaitre nos analyses et positions.

Dans le cadre des actions de plaidoyer locales / régionales, le soutien de Sophie Dru, adjointe des pôles thématiques nationaux, prend la forme souhaitée par les groupes locaux : identification des parlementaires intéressants à solliciter dans leurs régions, rédaction de courriel et recherche de contacts, préparation des rendez-vous de plaidoyer. Elle se tient à disposition des groupes locaux qui le souhaitent ! sophie.dru@lacimade.org | 07 88 45 00 96


Vous cherchez des ressources pour mener des actions de plaidoyer ?


>> Retrouvez des outils pratiques sur la page Cimadocs dédiée aux positions politiques et au plaidoyer des pôles thématiques, comme par exemple :

>> A lire aussi sur Cimadocs :

  • Les fiches de constats, analyses et revendications sur des sujets précis, élaborées par l’équipe des pôles thématiques nationaux. Ces fiches s’adressent tout particulièrement aux bénévoles et salarié∙e∙s de La Cimade amené∙e∙s à représenter l’association ou à s’exprimer en son nom (communiqués, prises de paroles, interventions publiques diverses). 

CETTE LETTRE
EST LA VÔTRE !

Une question, une idée,
un témoignage ?

lacimadine@lacimade.org

La Cimadine
Mentions légales La Cimadine